23 sénateurs emmenés par Jean-Pierre Raffarin, ex-premier ministre de Jacques Chirac, viennent de déclarer qu'ils ne voteraient pas en l'état la réforme sur la taxe professionnelle voulue pendant la campagne présidentielle et imposée par Nicolas Sarkozy. Il faut dire que Raffarin, comme un tiers des sénateurs et en plus grande proportion les députés, est aussi un élu local. En d'autres termes, bon nombre de parlementaires sont dans cette réforme à la fois juges et parties. On comprend donc leurs réticences à accepter "en l'état," cette réforme inefficace et injuste qui risque concrètement et au quotidien de les empêcher de faire correctement tourner leur collectivité dans laquelle ils ont été élus
Inefficace, car la supression d'une partie de cette taxe va permettre aux entreprises d'économiser près de 6 milliards d'euros. Le gouvernement et Sarkozy affirment à l'envi que cette économie permettra aux entreprises de sauver l'emploi voire d'en créer. On pourrait le croire, si les exonérations en tout genre offertes maintes et maintes fois par les différents gouvernements successifs, de droite comme de gauche, mais surtout de droite, aux entreprises avaient porté leurs fruits en la matière. Les entreprises se sont vu ces dernières années exonérer de plusieurs centaines de milliards d'euros de charges patronales, sans aucun emploi créés ou sauvés en contrepartie. Par contre, ces exonérations ont creusé davantage les caisses de la sécurité sociale. Qui pourra donc penser que ce nouveau cadeau offert aux entreprises servira les salariés...
Injuste aussi. Car cette réforme va priver les collectivités territoriales (communes, communautés de communes, agglos, départements, région) d'une manne financière primordiale à leur bon fonctionnement, notamment en matière de services publics. Or, Beaucoup d'entreprises travaillent justement grâce aux commandes de ces collectivités. Demain, ces entreprises travailleront moins puisque ces collectivités disposeront de moins d'argent. l'Etat promet d'offrir des compensations... qui risquent d'être une véritable arlésienne et donc ne jamais venir. En bout de chaîne, ce sont encore les contribuables qui vont devoir payer ce manque à gagner. Les collectivités n'auront vraisemblablement par d'autres choix que d'augmenter les impôts locaux et fonciers pour continuer à fonctionner et à réaliser.
Alors, c'est vrai que la taxe professionnelle fondée sur l'investissement en machines (taxe créée sur cette base initialement pour empêcher les entreprises de remplacer l'homme par la machine) est injuste. Mais plutôt que de ne plus soumettre les entreprises à l'impôt, pourquoi ne pas les soumettre autrement? Pourquoi ne pas mettre en place une taxe professionnelle fondée sur les profits réalisés par les entreprises ainsi que sur ces profits qui ne sont pas réinvestis dans l'entreprise mais placés en bourse? Une sorte de taxe Tobin locale en quelque sorte...
Une manière pour que tout le monde participe à l'effort. Mais cette réforme, proposée par les communistes, la droite gouvernementale ne veut évidemment pas en entendre parler. Car le fond véritable de la suppression de la taxe professionnelle est réellement de faire un nouveau cadeau aux patrons et à leur syndicat, le Medef, dont le n°2 était, au moment de l'élection présidentielle, le frère de ... Nicolas Sarkozy !