L’enjeu industriel
est majeur dans une région, où l’automobile, l’énergie, la pharmacie, le verre, l’activité portuaire dominent… Développer l’industrie, c’est assurer l’emploi. La liste de Sébastien Jumel en fait une priorité.
Rouen (Seine-Maritime), envoyé spécial.
La Haute-Normandie multiplie les atouts : région agricole, touristique et aussi et surtout industrialo-portuaire. Elle regroupe ainsi des industries traditionnelles de premier plan (automobile, papeterie…) et des industries de haute technologie (aérospatiale, aéronautique, pharmaceutique…). Mais la crise financière « et la casse organisée par l’actionnariat », selon Sébastien Jumel, la tête de liste du Front de gauche dans cette région, sont passées par là et avec elles des milliers d’emplois ont disparu : près de 25 000 en 2009 dont la moitié dans l’industrie, victime ainsi en 2008 d’une baisse de l’emploi de 3 %. La barre des 10 % de chômeurs (cinquième région la plus touchée par le chômage) a donc été naturellement franchie en 2009, contre 8,6 % en 2008. Les premiers touchés sont les moins de 25 ans dont plus de 30 000 d’entre eux ont déjà quitté la région depuis 2001.
Autre constat partagé par tous, ou presque : la nécessité de relancer l’industrie. « Ou presque » car, à droite, la tête de liste Bruno Le Maire, également ministre de l’Agriculture, n’envisage l’emploi que sous la forme d’emplois verts au sein des associations « dont l’objet est l’entretien des sites naturels, des espaces verts et de rivières » et de « doubler le budget régional consacré à la recherche et à l’innovation ». Ambition très mince donc et illusoire surtout. Car même si la région s’est vu décerner le prix de la meilleure gestion de France, la suppression prochaine de la taxe professionnelle risque de peser lourd dans le budget et donc dans les investissements régionaux. La réunification des deux Normandie est pour le proche de Nicolas Sarkozy la pierre angulaire de son programme pour l’emploi dont il prétend faire sa priorité. Reste aussi la dernière trouvaille de l’ancien directeur de cabinet de Villepin : axer le développement économique de la région sur le tourisme (6 % des emplois seulement). On est bien loin donc d’une politique ambitieuse en faveur du développement industriel. La liste Europe Écologie, conduite par Claude Taleb, conseiller régional sortant, ne jure elle aussi que par des emplois verts et par l’endettement « qu’autorise l’excellente santé de ses finances » pour financer les projets industriels majeurs.
Du côté du Parti socialiste, on se gargarise d’avoir un excellent bilan et une excellente situation financière. Le programme ? Continuer sur cette lancée en promettant qu’en cas de réélection du fabiusien Alain Le Vern à la tête de la région, un label Fabriqué en Normandie sera élaboré pour sauver le savoir-faire des délocalisations. Promesse est faite aussi de créer un pôle public pour l’investissement et l’innovation et de poursuivre les aides financières aux entreprises, désormais conditionnées par les critères de l’emploi, des conditions de travail et du respect de l’environnement.
« Pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt ? » s’interroge de son côté le Front de gauche. « Pendant six ans, la commission de contrôle de cet argent public n’a fonctionné qu’à deux reprises », révèle Gaëtan Levitre, maire PCF d’Alizay où est installée la papeterie M-Real menacée par un plan social de 99 emplois et qui a bénéficié de subventions de la région. « Le reste du temps, tout était décidé dans les bureaux du conseil régional », poursuit-il. « Contrairement au NPA qui rejette toute aide publique aux entreprises, nous disons que le problème n’est pas l’aide mais son contrôle », conclut l’élu qui constate avec amusement que le PS a repris les idées du Front de gauche sur ce sujet.
La priorité du Front de gauche demeure donc le maintien de l’industrie traditionnelle, à commencer par l’automobile qui génère près de 30 % de la production nationale et des milliers d’emplois chez les sous-traitants (Autoliv, Sealinx…) dans la région. Dans le domaine de la papeterie, engagement est fait de favoriser l’utilisation locale des forêts très présente dans cette région plutôt que de faire venir le bois de l’étranger (Angleterre essentiellement). La question du développement durable est donc au cœur du programme du Front de gauche, au point d’ailleurs d’envisager comme Julien Dugnol, 13e sur la liste et qui travaille à Grand-Couronne, que les futurs élus impulsent une dynamique pour valoriser le transport fluvial des marchandises en y conditionnant les aides aux entreprises. L’accent sera également mis sur la formation continue et dans l’innovation industrielle. « Mais avant tout, précise Jean-Luc Lecomte, maire adjoint communiste de Vernon et tête de liste dans l’Eure, il faudra convoquer des assises pour l’emploi afin d’examiner la situation de chaque filière car la région actuelle, n’a réalisé aucune étude sur le sujet malgré la grave crise industrielle. »
Frédéric Seaux
REPERES
La Haute-Normandie est composée de deux départements, l’Eure et la Seine-Maritime. Elle compte 1,8 million d’habitants et la capitale régionale est Rouen.
Premier tour des régionales 2004 : Le Vern (PS, PCF, Verts), 39 % des voix (53 % au deuxième tour) ; Rufenacht (UMP), 21 % des voix (33 % au deuxième tour) ; Chaboche (FN), 16 % des voix (15 % au deuxième tour) ; Morin (UDF), 13 % des voix ; Poupin (LCR, LO), 6 % des voix.
Conseil régional sortant : 22 PS, 8 PCF, 6 Verts, 5 Nouveau Centre, 8 UMP, 6 FN.